La Princess' plus camion que carrosse qui préfère la fée Carabosse.

mercredi 20 octobre 2010

Vieilles branches #2

Christian Bobin dit quelque part, et à peu prés ( je lui demande de bien vouloir pardonner ma mémoire défaillante ), que les arbres sont des personnes remarquables. Certains ne s'appellent-ils pas des hêtres ? Et puis, quand ils sont morts, les arbres sentent bon. Quelle élégance magnifique ! Dans le texte fondateur du Mahayana définitif, Le Sûtra du Lotus, une parabole décrit les bodhisattvas, venus en ce monde pour aider les êtres humains à sortir de leurs souffrances, comme de grands arbres.
Dans la forêt de Vérignon, prés d'Aups, en Provence, les chênes blancs sont en majesté, et naturellement vous inspirent noblesse et sérénité, ils vous contaminent en douceur. Leur nombre ( une foule silencieuse ), leur âge ( plusieurs centaines d'années ), leur taille ( parfois 7 m de diamètre ) forcent l'admiration et le respect. En compagnie de ces vénérables sujets, j'ai eu d'abord le sentiment d'être agitée, confuse, ma condition d'être humain ordinaire devenait soudain incongrue et dérangeait une harmonie solennelle. J'étais presque gênée, et je m'excusais de mon indélicatesse. Je devais les rencontrer, respirer au même rythme. Alors j'ai marché, silencieuse, concentrée, humble, parfois posant ma main, ou ma joue, délicatement, contre un tronc puissant. Un silence profond enveloppait la forêt, qui peu à peu s'est imposé à moi. Avec le silence, l'apaisement a gagné mon coeur, et recueillie, dans une embrassade consentie par l'arbre sollicité, j'ai reçu la force et l'équilibre qui me faisaient défaut à mon arrivée. Je n'étais plus désaccordée. Je suis rentrée dans l'arbre comme dans un livre. Ils sont de la même famille et aspirent à être déchiffrés.
Les arbres sont silencieux, mais au  coeur même du
silence, à condition de les rejoindre, ils communiquent leur sagesse.
Je n'allais pas revenir indemne de ma rencontre avec le peuple des chênes anciens, j'étais comme révélée à moi-même.
La mousse habillait les branches noueuses. Des arbres de velours torturés et soyeux, bossus et somptueux, difformes et généreux. J'étais en noble compagnie, entourée de mémoires vivantes et muettes, de morts restés debout, et habités d'oiseaux, de colonies d'insectes et d'écureuils, de branches tombées, en épousailles avec la terre, de souches fossiles, abris providentiels de créatures discrètes.



Les arbres, une fois encore, m'ont fait le don de mon humanité, m'ont permis de redécouvrir ma propre énergie de vivre.

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